Le massage russe

Le massage russe

par J.M.F et Orsolya Molnar

À l’origine, la vie est équilibre, mouvement et harmonie. Comme un cœur qui pulse, ce battement est alternance de contractions et de relâchements. L’énergie de vie circule librement dans tout notre être.
Mais la vie n’est pas un long fleuve tranquille et les obstacles surviennent: hérédité, blessures physiques et relationnelles, émotions non exprimées (surtout dans l’enfance), rancunes, haine, sentiments refoulés,…
Pour tenter de mettre à l’écart la souffrance, on se barricade. Les tensions deviennent les fermetures d’un cœur qui a peur.
Nos barrages internes se matérialisent sous formes de tensions physiques.
Certaines zones se figent, comme des portes claquemurées d’un château. Elles se ferment à la circulation, s’écartent de la respiration, fuient la vie.
Notre réseau relationnel encombré, les échanges entre les organes se dégradent; la communication endommagée, l’entente se détériore.
L’énergie n’afflue plus sans obstacles, elle se bloque, stagne.
Nous nous habituons à fonctionner ainsi, cloisonnés, à n’y plus faire attention, n’en percevant que les symptômes. Chacun en vit les limitations suivant ses propres faiblesses : maux de ventre, ulcères, sinusites, calvitie, myopie, limitation de la mobilité, douleurs lombaires,…

Le massage russe est un massage musculaire profond, chemin parmi d’autres pour révéler et dénouer ces tensions.
Afin de réhabiliter les zones ankylosées, le masseur utilise différents outils (piétinement, bercement harmonique, fouet, bâton long, bâtons courts,…), assouplît, pétrit le corps pour que l’énergie puisse oxygéner, sillonner toute la matière, de façon plus fluide.
Moins notre corps subit de contraintes, plus il peut déployer ses capacités de régénération.

Dans le massage russe, la douleur est notre alliée. Sans elle, comment pourrions-nous savoir où notre corps a concentré les toxines ?
En appuyant progressivement sur les tensions musculaires et en y restant, le masseur les met en lumière, les fait émerger à la conscience. Ainsi débusquées, identifiées, elles peuvent commencer à se disperser.
En première réaction, c’est la révolte. Aussi incroyable que cela puisse paraître, nous tenons à nos résistances, nous vivons avec, elles nous sommes familières, connues. Le corps alors se raidit, comme si le fait de se crisper allait arrêter la douleur.
Si celle-ci se prolonge, le corps apprend que seule la détente lui permet de supporter cette douleur, de relâcher la pression, de la faire circuler. Comme dans une forêt vierge, la personne massée trouve alors le chemin étroit qui lui permet de traverser l’intensité douloureuse et de la dissiper.
Et ce, grâce à un outil « magique » : la RESPIRATION.
Plus la respiration se fait, plus les tensions se défont.
Moins le corps se défend, plus le coeur se détend.

Le massage russe est avant tout un  massage relationnel. C’est dans la relation masseur/massé qu’il prend sa source et non dans les techniques.
Par sa justesse, son savoir-être, le masseur va générer la confiance chez la personne qu’il masse pour lui permettre de lâcher ses tensions. Sans cette confiance, le massé ne pourra se relâcher.
De même, les tensions du masseur se retrouvent dans le massage qu’il donne. Celui-ci doit alors travailler sans cesse à relâcher ses propres tensions pour ouvrir son cœur, grandir dans l’écoute, oser s’offrir. De plus en plus juste dans son massage, il sait reconnaître la limite du massé, ses propres limites, le seuil de douleur à ne pas dépasser. Il  devient plus libre et plus équilibré.
C’est dans le cercle vertueux de cette confiance grandissante et réciproque que grandit à son tour la confiance chez le massé.
Le massage russe devient alors un acte spirituel. Un acte de guérison mutuelle qui dépend davantage de l’aptitude du don de soi, de l’amour de son prochain que de n’importe quelle technique.